Article de BFM / Tom Kerkour / 18/01/25
Les études sur l'impact négatif des aliments ultratransformés se multiplient. Pour le consommateur, naviguer dans les rayons du supermarché pour éviter ces produits nécessite un œil aiguisé. Voici quelques conseils d'experts.
Maladie de Parkinson, troubles digestifs, atteintes cardiovasculaires... Une récente étude publiée dans The Lancet met en lumière la surmortalité associée à la consommation régulière d'aliments dits "ultratransformés".
Cette dernière alarme en date place à nouveau l'accent sur ce problème. Un enjeu sur lequel les scientifiques se penchent depuis plusieurs décennies déjà. À chaque nouvelle étude, la certitude est renforcée: il faut limiter la consommation de ces produits, qui ont aujourd'hui une part trop importante dans nos assiettes. Y compris chez les enfants, qui en avalent près de deux fois trop.
Pourtant, le consommateur dispose de peu de clés pour identifier ces produits omniprésents dans les grandes et moyennes surfaces, "près de 70% de l'offre industrielle, les produits emballés avec un code-barre", selon une étude menée par les chercheurs dont Anthony Fardet, spécialiste en nutrition humaine de l'Inrae.
Comment naviguer entre les rayons, les produits et les étiquettes pour trouver les produits les plus "propres"? Un guide de BFMTV.com à l'aide d'experts.
• Qu'est-ce que c'est un produit "ultratransformé"?
Un produit ultratransformé se définit comme un aliment "qui a subi d'importants procédés de transformation par l'industrie agroalimentaire", dans son contenu ou dans sa forme, comme l'explique à BFMTV.com Mathilde Touvier, directrice de recherche en épidémiologie nutritionnelle à l'Inserm. Un changement profond de la matrice de l'aliment.
D'une part, il peut s'agir de transformations physiques, comme celles que subissent les céréales du petit-déjeuner, qui sont dites "extrudées", ce qui permet d'obtenir leur texture friable et poreuse si reconnaissable.
Mais l'ultratransformation peut aussi passer par l'ajout d'additifs, qui visent à modifier le goût, l'apparence ou leur odeur. Des arômes, ou des additifs cosmétiques, auxquels s'ajoute une autre catégorie contenant des éléments comme des graisses hydrogénées, ou bien des sucres ultratransformés comme le sirop de glucose fructose.
Il existe d'ailleurs une gradation dans les produits, certains contiennent un unique additif, d'autres en cumulent. Dans ce domaine, le moins, le mieux.
• L'étiquette, la source la plus fiable
La transformation physique est plus difficile à identifier pour le consommateur. Le reste se trouve facilement au dos du produit.
"Nous avons calculé qu'au-delà de 5 ingrédients, c'est-à-dire 6 et plus, il y a presque 80% de chance que l'aliment soit ultratransformé. En gros, plus la liste est longue plus il faut se méfier, surtout si on voit des noms qu'on n'a pas dans sa cuisine", schématise Anthony Fardet.
"Si on voit juste un conservateur au nom bizarre ce n'est pas un marqueur d'ultratransformation", précise-t-il.
Il faut donc chercher les E56, E12 ou autre "arômes artificiels". Les conservateurs, eux, n'entrent pas dans le cadre de la définition du produit ultratransformé. "On a affaire à des conservateurs qui sont là pour prévenir certains risques microbiologiques comme le botulisme, ce qui a finalement quand même un impact santé bénéfique", précise Mathilde Touvier.
• Certains rayons plus touchés que d'autres
Avant même d'attraper un produit, les consommateurs peuvent ajuster leur vigilance en fonction des rayons. Car, si les produits frais comme les légumes en vrac sont plus épargnés, il existe tout de même des différences au sein des types de produits.
Dans les rayons plats préparés, produits sucrés, pâtisseries et biscuits industriels, viandes et charcuteries industrielles et produits salés, le taux de produit ultratransformés dépasse les 70%. "On redescend sous les 60% pour les produits de la mer, les boissons et les produits laitiers", liste Anthony Fardet.
Il existe un bon élève, le rayon bio ou la moitié des produits ne sont pas ultratransformés. Et un mauvais élève, là où on trouve en majorité des produits destinés aux enfants.
• Le facteur prix, un critère important
Pourquoi les industriels choisissent-ils parfois de remplacer du sucre ou du beurre par des alternatives? Le prix! La différence de prix entre le sirop de glucose et le sucre de table par exemple est d'un pour dix.
"Plus les prix sont bas, plus on a de chance que ce soit ultratransformé. Pour arriver à des prix aussi bas, il n'y a pas de secret, on remplace les ingrédients nobles par des agents cosmétiques marqueurs d'ultratransformation", explique Anthony Fardet.
En moyenne, un produit ultransformé coûte 17% moins cher, avec quelques exceptions. Mais ce qui est vrai en France ne l'est pas partout. Dans d'autres cultures, ces produits peuvent coûter bien plus cher et ne pas être destinés aux catégories socioéconomiques les plus précaires.
• Le faux allié: Nutriscore
Depuis son entrée en vigueur, le Nutriscore est désormais bien connu des consommateurs. Il sert à "faciliter la compréhension des informations nutritionnelles par les consommateurs", comme le précise Santé publique France. Des informations contextuelles au sein d'un rayon, pour préciser la qualité d'un produit par rapport à un autre similaire.
Mais la dimension d'ultratransformation n'est, elle, pas prise en compte dans le calcul. Une étude de l'Inrae sur le précédent système de Nutriscore avait démontré que la moitié des produit au Nutriscore "A" ou "B" étaient des produits ultratransformés.
"Le Nutriscore intègre maintenant une pénalisation des boissons édulcorées, donc il y a quand même une dimension qui commence à être approchée", note la chercheuse de l'Inserm. Elle précise que des chercheurs proposent un nouveau système avec un "bandeau noir" indiquant "produit ultratransformé". Les lobbies sont opposés à cette idée.
• Promos, emballage, mentions spécifiques... Des indices en vrac
L'étiquette, le rayon, le type d'aliment... Ces grandes lignes peuvent fournir beaucoup d'informations aux acheteurs. D'autres pistes contextuelles sont également listées par les experts, y compris sur la base d'observations empiriques.
"Il faut se méfier des emballages très colorés, flashy, des personnages de l'univers des enfants, de l'hyper emballage, des portions individuelles, des promotions, etc", liste le spécialiste de l'Inrae.
Les mentions spécifiques "enrichi en", "source de", par exemple en vitamines ou en protéines, cachent parfois des produits ultratransformés. Il en va de même pour les produits allégés.
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